Introduction

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Rééducation isocinétique du tronc

L’isocinétisme est largement utilisé pour l’évaluation de la force musculaire et pour le renforcement musculaire. Les modes de contraction musculaires proposés, à vitesse constante, induisent des contractions musculaires à la fois intenses, répétées et sécuritaires pour le patient. De plus, les feedbacks qui sont affichés permettent au patient de mieux ressentir l’effort effectué et au thérapeute de contrôler le travail réalisé et les progrès.

Le renforcement musculaire chez la personne hémiplégique est important car la capacité de marche est reliée à la force développée au niveau des extenseurs et fléchisseurs du genou (Bohannon and Walsh, 1992; Flansbjer et al., 2006; Kim and Eng, 2003).

Le membre inférieur

La plupart des études montrent des effets positifs de l’isocinétisme sur le renforcement musculaire des membres inférieurs et sur les capacités de marche. Rouleaud et al. (2000) proposent un programme de rééducation comprenant 6 semaines de renforcement musculaire isocinétique en mode excentrique des membres inférieurs (extenseurs et fléchisseurs du genou), à différentes vitesses (60-120-150°/s) et en complément d’une prise en charge conventionnelle pour des patients AVC chroniques. Suite à ce protocole, ils notent une amélioration significative de la vitesse de marche de confort.

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Rééducation isocinétique du membre inférieur

Sharp et Brouwer (1997) proposent un suivi longitudinal de 15 patients ayant eu un AVC depuis plus de 6 mois avec un réentraînement programmé sur 6 semaines. Les exercices d’isocinétisme sont effectués en concentrique à des vitesses de 30, 60 et 120°/s. Ils notent une augmentation de la force des muscles fléchisseurs et extenseurs du genou et une amélioration de la vitesse de marche persistant jusqu’à 4 semaines après l’arrêt de la rééducation. Bien qu’il n’y ait aucune évolution sur le temps nécessaire à la réalisation du test « Up and Go », les patients ressentent une amélioration de leurs capacités physiques à la fin du protocole de rééducation et jusqu’à 4 semaines. Aucun effet sur la spasticité n’a été reporté.

Une autre étude propose de comparer l’effet d’un renforcement musculaire isocinétique en mode concentrique par rapport à un protocole de mobilisation passive. Le travail concentrique est réalisé à une vitesse de 60°/s au niveau des articulations de la hanche, du genou et de la cheville. Les auteurs notent une évolution de la vitesse de marche dans les deux groupes mais aucune différence significative intergroupe. Seule une légère tendance à l’amélioration de la force dans le groupe isocinétique par rapport au groupe mobilisation passive semble en résulter (Kim et al., 2001).

Engardt et al. (1995) ont essayé de distinguer les effets d’une contraction isométrique concentrique et excentrique. Les deux modes de contraction offrent des améliorations sur les paramètres de marche et la force musculaire des extenseurs et des fléchisseurs du genou. Cependant, le pic de force est supérieur avec un travail en excentrique, ainsi que la répartition des appuis au sol lors d’un transfert assis-debout. Une autre étude porte sur la différence entre le renforcement isocinétique (même vitesse) et le renforcement isotonique (même charge) chez le patient en phase subaigüe. Chen et al. (2015) ont montré que le protocole isocinétique permet, à la fois, une amélioration globale de la force musculaire des extenseurs et des fléchisseurs du genoux, et une meilleure évaluation du score de qualité de vie (SF36) par rapport au protocole isotonique. Les auteurs recommandent donc l’utilisation d’un système isocinétique si cela est possible du point de vue du patient dans le but d’optimiser sa rééducation.

Le membre supérieur

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Rééducation isocinétique du membre supérieur

Enfin, une étude est parue sur l’emploi du régime isocinétique dans la rééducation du membre supérieur chez le patient AVC en phase chronique. Le dispositif  est couplé à une assistance robotisée pour contrôler au mieux le mouvement et propose des mouvements bi-manuels. Le protocole s’appuie sur 30 minutes d’utilisation de ce système couplé à une thérapie classique (10 minutes), 3 fois par semaine pendant 8 semaines. Les auteurs mettent en avant une amélioration significative de la force de grip, de poussée et de tiré, ainsi que des habiletés motrices améliorées (vitesse de déplacement, pic de vitesse, score FMA). Ces résultats incitent à poursuivre les études sur l’isocinétisme dans la rééducation du membre supérieur (Chang et al., 2007).

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Dispositif de rééducation isocinétique bimanuel de Chang et al. (2007)

Conclusion

L’isocinétisme semble être un outil performant dans la rééducation et l’évaluation (non discutée ici) du patient post-AVC. Cependant, le coût d’un tel dispositif réduit de façon importante sa capacité d’utilisation pour une majorité de patients. C’est pourquoi, aujourd’hui, l’isocinétisme est essentiellement tourné vers des fonctions d’évaluation plutôt que de rééducation.

Par ailleurs, il apparaît que la vitesse dans le paramétrage des séances puisse jouer un rôle important. En effet, on a pu voir que l’étude menée à des vitesses angulaires faibles n’entraînait pas ou peu d’effets positifs pour le patient. De plus, le côté analytique du mouvement n’est pas en phase avec les recommandations de l’HAS qui préconise des exercices tournés davantage vers les activités de la vie quotidienne.

Bibliographie

Bohannon, R.W., Walsh, S., 1992. Nature, reliability, and predictive value of muscle performance measures in patients with hemiparesis following stroke. Arch. Phys. Med. Rehabil. 73, 721–725.

Chang, J.-J., Tung, W.-L., Wu, W.-L., Huang, M.-H., Su, F.-C., 2007. Effects of robot-aided bilateral force-induced isokinetic arm training combined with conventional rehabilitation on arm motor function in patients with chronic stroke. Arch. Phys. Med. Rehabil. 88, 1332–1338.

Chen, C.-L., Chang, K.-J., Wu, P.-Y., Chi, C.-H., Chang, S.-T., Cheng, Y.-Y., 2015. Comparison of the Effects between Isokinetic and Isotonic Strength Training in Subacute Stroke Patients. J. Stroke Cerebrovasc. Dis. Off. J. Natl. Stroke Assoc.

Engardt, M., Knutsson, E., Jonsson, M., Sternhag, M., 1995. Dynamic muscle strength training in stroke patients: effects on knee extension torque, electromyographic activity, and motor function. Arch. Phys. Med. Rehabil. 76, 419–425.

Flansbjer, U.-B., Downham, D., Lexell, J., 2006. Knee muscle strength, gait performance, and perceived participation after stroke. Arch. Phys. Med. Rehabil. 87, 974–980.

Kim, C.M., Eng, J.J., 2003. The relationship of lower-extremity muscle torque to locomotor performance in people with stroke. Phys. Ther. 83, 49–57.

Kim, C.M., Eng, J.J., MacIntyre, D.L., Dawson, A.S., 2001. Effects of isokinetic strength training on walking in persons with stroke: a double-blind controlled pilot study. J. Stroke Cerebrovasc. Dis. Off. J. Natl. Stroke Assoc. 10, 265–273.

Rouleaud, S., Gaujard, E., Petit, H., Picard, D., Dehail, P., Joseph, P.A., Mazaux, J.M., Barat, M., 2000. Isocinétisme et rééducation de la marche de l’hémiplégique. Ann. Réadapt. Médecine Phys. 43, 428–436.

Sharp, S.A., Brouwer, B.J., 1997. Isokinetic strength training of the hemiparetic knee: effects on function and spasticity. Arch. Phys. Med. Rehabil. 78, 1231–1236.