- Le membre inférieur
Le taux de récupération post AVC est fonction de nombreux facteurs et il est impossible de présager du recouvrement des différentes fonctions au stade aigu. Néanmoins, on peut noter que les récupérations motrices sont incomplètes pour 2/3 des personnes, et une aide humaine est indispensable pour 25 à 30% d’entre-elles dans le but de retrouver une bonne qualité de vie (Hendricks et al., 2002). Dans le cas où une paralysie se développe, moins de 15% des patients ont une récupération motrice complète. Le degré de récupération de la capacité de marche ne peut être envisagé lors des premiers stades de rééducation et survient approximativement chez 80% des patients hémiplégiques (Debelleix, 1997; Hendricks et al., 2002). Au delà de 3 à 6 mois, on peut considérer pour la plupart des patients hémiplégiques, qu’ils vont atteindre un plateau de récupération, hormis pour quelques patients associant des troubles cognitifs. Il est par conséquent primordial d’optimiser les soins dans cette fenêtre de rééducation.
Les désordres qualitatifs de la marche hémiplégique sont très bien connus et ne reposent pas sur le seul critère musculaire. Les objectifs thérapeutiques sont multiples et visent une marche plus stable, performante et esthétique. Les anomalies de la séquence de marche proviennent de perturbations plus ou moins marquées de l’équilibre, d’une limitation de l’amplitude de mouvement sur les membres inférieurs, d’une perte de force musculaire (parésie) et de troubles de tonus (Fujitani et al., 1999). Le membre inférieur sain vient en compensation des perturbations engendrées par le membre parétique (Calmels et al., 2005; Nilsson et al., 2001). L’analyse qualitative de la marche montre une asymétrie d’appuis entre les deux membres inférieurs au sol (Ashworth, 1964; Calmels et al., 2005; Nilsson et al., 2001). Le membre déficient passe moins de temps en appui au sol (phase de support) et davantage de temps en oscillation. La longueur du pas du côté déficitaire est plus faible que celle du côté sain. Enfin, la capacité à marcher rapidement du fait de l’incapacité à allonger le pas (Ashworth, 1964; Calmels et al., 2005), la capacité d’endurance (Ivey et al. 2006; Severinsen et al. 2011) et la force des membres inférieurs se trouvent grandement réduites (Patten et al. 2004; Severinsen et al. 2011).
- Le membre supérieur
Concernant le membre supérieur, Stinear et al. (2014) ont proposé une méthode afin d’envisager le potentiel de récupération en phase aigüe. Il s’agit d’un algorithme incluant des échelles d’évaluation clinique, des évaluations neurophysiologiques et des examens en neuro-imagerie. L’intérêt d’une telle méthode est de mettre en place une rééducation adaptée et sur mesure dans les premiers jours de prise en charge afin d’optimiser les progrès du patient. Cependant, les coûts importants générés par ces examens (neuro-imagerie et évaluation neurophysiologique) ne permettent pas, pour l’instant, de systématiser cette approche. Cela est d’autant plus dommage que les déficiences acquises sur le membre supérieur impactent de façon importante la qualité de vie du patient ainsi que la réalisation de tâches quotidiennes simples (Sveen et al., 1999).
Les déficiences acquises au niveau du membre supérieur à la suite d’un AVC sont persistantes dans le temps et très invalidantes (Lai et al., 2002). Selon Nakayama et al. (1994), 20 à 50% des patients retrouvent une fonction du membre supérieur suffisante pour interagir « correctement » dans leur environnement. Quant aux patients ayant développé des déficiences suite à leur AVC, 50% d’entre-eux garderont des troubles fonctionnels au niveau du bras jusqu’à 4 ans (Broeks et al., 1999). Le problème majeur est qu’il a été démontré que les fonctions motrices du/des membre(s) supérieur(s) sont fortement liées à l’autonomie et à la perception de sa qualité de vie (Franceschini et al., 2010; Sveen et al., 1999). La prise en charge rééducative du membre supérieur est donc un point essentiel dans l’amélioration de l’état fonctionnel global du patient. L’objectif du praticien est donc de proposer des situations de rééducation et d’apprentissage qui permettent au patient de recouvrer une autonomie suffisante (réduction des aides extérieures) et la meilleure qualité de vie possible. Comme le montrent Pollock et al. (2014) dans leur revue de protocoles, de nombreuses méthodes et thérapies se sont développées dans cette optique: mobilisation passive, répétition de tâches spécifiques orientées, contrainte induite, réalité virtuelle, assistance robotique ou encore stimulations transcraniennes.
Bibliographie
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Broeks, J.G., Lankhorst, G.J., Rumping, K., Prevo, A.J., 1999. The long-term outcome of arm function after stroke: results of a follow-up study. Disabil. Rehabil. 21, 357–364.
Calmels, P., Degache, F., Fayolle-Minon, I., Condemine, A., Courbon, A., Ramas, J., Richard, R., Roche, F., Degache, A., Girardin, N., Gautheron, V., Devillard, X., 2005. Hémiplégie et tour du Mont Blanc : de l’espoir à la réalité. Ann. Réadapt. Médecine Phys. 48, 180–186.
Debelleix, X., 1997. La rééducation de l’hémiplégie vasculaire de l’adulte améliore-t-elle la marche? In: Annales de Réadaptation et de Médecine Physique. pp. 121–130.
Franceschini, M., La Porta, F., Agosti, M., Massucci, M., ICR2 group, 2010. Is health-related-quality of life of stroke patients influenced by neurological impairments at one year after stroke? Eur. J. Phys. Rehabil. Med. 46, 389–399.
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Sveen, U., Bautz-Holter, E., Sødring, K.M., Wyller, T.B., Laake, K., 1999. Association between impairments, self-care ability and social activities 1 year after stroke. Disabil. Rehabil. 21, 372–377.